Le Ministère des Finances a déposé la nouvelle version du projet de la Loi de Finances rectificative pour l’année 2020.
Après le rejet de la première version du projet de la Loi de Finances rectificative avec le « Nein » du Gouverneur de la BCT, qui a refusé de voir trois ans d’efforts s’évaporer en trois mois, les équipes techniques à la Kasbah ont révisé certains points mais sur le fond, rien n’a changé.
300 MTND de ressources fiscales supplémentaires
Le déficit budgétaire est passé de 13,4% dans l’ancien texte à 11,4%, toujours à des niveaux inquiétants. Le nouvel objectif est de lever 8 100 MTND d’ici la fin de l’année. La dette atteindrait 97 700 MTND, soit 87,9% du PIB. Le budget total serait de 49 712 MTND contre 51 699 MTND dans l’ancienne version, et 47 227 MTND dans la Loi de Finance 2020.
Ces chiffres découlent en fait des modifications des projections. Les impôts directs seraient de 11 837 MTND, en baisse de 6,4% par rapport à 2019. C’est quasiment le même montant ciblé dans la première version, avec une hausse de 200 MTND. Cette amélioration provient de l’impôt sur les sociétés qui atteindrait 3 015 MTND contre 2 815 MTND estimés auparavant. Plus particulièrement, ce sont les compagnies pétrolières qui paieront plus, alors que rien n’a changé pour celles opérant dans les autres secteurs.
La hausse attendue des impôts indirects serait de 100 MTND à 14 570 MTND, provenant essentiellement de la TVA dont les recettes seraient de 6 773 MTND. Les autres rubriques de recettes indirectes ne changeraient pas.
En totalité, les recettes fiscales n’augmenteraient que de 300 MTND. Cette hausse a plus que compensé la diminution des recettes non fiscales. Celles-ci sont passées de 2 807 MTND dans le texte retiré à 2 757 MTND dans la nouvelle mouture. Les 50 MTND qui manquent proviennent de moindres recettes de cessions de biens confisqués qui ne dépasseraient pas 100 MTND.
Le marché intérieur toujours sollicité
Côté endettement extérieur, c’est quasiment une stabilité avec 82 MTND supplémentaires par rapport à la première version pour un total de 7 364 MTND. Le surplus provient des crédits d’appui budgétaire. Sachant que la Tunisie a accédé à 100 M€ grâce à l’AFD, quelques semaines auparavant.
Le vrai dégraissage concerne l’endettement interne. Il est passé de 14 267 MTND à 11 948 MTND, une baisse de 2 319 MTND. L’Etat compte réaliser moins de sorties sous forme de BTA (6 898 MTND); alors que celles de BTCT sont gardées stables à 2 435 MTND.
Par rapport aux montants déjà levés jusqu’au 13 novembre, l’Etat ne compte sortir sur le marché de BTCT que dans la limite de 55 MTND. Puisque ses interventions ont déjà atteint 2 2380 MTND depuis le début de l’année. Pourtant, le Trésor devrait rembourser 2 010 MTND au cours du mois de décembre 2020 de BTCT émis au cours de l’année. L’Etat compte reporter cette opération à 2021, par l’émission d’une nouvelle ligne de 52 semaines. Nous comprenons donc qu’il s’agirait bien d’une adjudication d’échange.
Pour les BTA, il y aura toujours l’intention d’émettre plus de 5 000 MTND. Un vrai défi car ce que nous avons vu la semaine dernière à l’occasion de la fameuse émission de 1 000 MTND n’inspire pas confiance.
Moins de compensations pour équilibrer les comptes
Cette réduction des ressources doit être reflétée au niveau des dépenses. Les 300 MTND supplémentaires dégagés par les ressources fiscales seraient immédiatement absorbées par la masse salariale. Celle-ci a augmenté du même montant pour s’établir à 19 547 MTND. Mais pour le ministère, cette hausse sera financée par l’enveloppe dédiée aux dépenses imprévues.
La baisse devrait concerner les interventions de l’Etat. Elles vont passer de 12 987 MTND à 11 237 MTND, soit une réduction de 1 750 MTND. Elle provient essentiellement de la compensation qui a chuté de 6 236 MTND à 4 486 MTND. Cette baisse spectaculaire trouve son origine dans les remboursements de 1 600 MTND initialement programmés à la STIR et qui seraient limités à 776 MTND dans la copie récente du projet de Loi.
Par rapport à ses créanciers, l’Etat compte bien honorer une partie de ses engagements, avec 300 MTND au profit des professionnels du BTP.
Globalement, la croissance restera à -7,3% bien que les comptes de la Nation du troisième trimestre affichent déjà -10% pour les neuf premiers mois de l’année. Ce qui complique même cette hypothèse. Les débats seront houleux. Même le projet de Loi de Finances 2021 serait significativement touché par les députés. En fin de compte, rien de fondamental n’a changé. L’amélioration de la politique budgétaire reste un chantier encore ouvert.