Quelle marge de manoeuvre pour le gouvernement Bouden? La question est sur toutes les lèvres, alors que l’on parle de la loi de finances complémentaire et de la loi de finances de 2022. Que peut faire le gouvernement Bouden pour redresser la situation?
Pour répondre à cette question, nous avons demandé leur avis à deux économistes chevronnés: Jamel Aouididi, économiste, expert en développement et Hatem Salah, professeur d’économie à l’université de la Manouba et directeur du laboratoire Thema à l’Ecole supérieure de commerce (ESC) de Tunis.
Deux pointures qui nous aideront à mieux saisir les défis d’un instant fait, entre autres, d’une dette devenue insoutenable.
L’évocation de cette dette nous mène tout droit à analyser l’économie tout entière et notamment les grands défis, actuels et futurs, auxquels le gouvernement Bouden devra faire face, tout autant que la politique à adopter vis-à-vis du dinar et de la relance.
Dans ce cadre, nous avons voulu savoir quelles recommandations nos deux invités peuvent faire au gouvernement Bouden, qui a du pain sur la planche. Aussi bien Jamel Aouididi que Hatem Salah n’ont pas manqué de dresser les diagnostics. Cela mérite le détour. A lire donc ces deux interviews croisés dans le magazine.
Comment financer cette relance?
Le but est de savoir ce que peut – et doit – faire le nouveau gouvernement pris en tenaille entre le marteau de l’impératif de relance de l’économie et l’enclume de l’effroyable mur de la dette qui explose. Et laisse peu, sinon très peu, de marges de manoeuvre au gouvernement Bouden.
A deux mois de l’échéance du 31 décembre, on sait très peu de choses sur ses intentions. Sur les moyens et les mécanismes qu’il entend mettre en oeuvre pour boucler l’année 2021. Et dans quel état d’esprit et avec quel programme le gouvernement va aborder 2022. Vous l’aurez compris. Le débat va se focaliser en premier sur les lois de finances. Etant entendu qu’il semble qu’on ait transgressé toutes les règles en vigueur en la matière.
Préparer une loi de finances 2022 sans que l’on sache comment boucler l’année 2021 avec un trou béant de près de 9 MD ramené comme par enchantement à 3 MD. Peut-on, serait-ce possible de présenter une LF – qui ne fera pas l’objet de discussions parlementaires – sans envisager au préalable une LFC ? Comment et par quels moyens résorber le déficit de 2021 ?
On a besoin de ce premier éclairage. Sur quelle base doit être construite la LF 2022 ?
Est-ce par rapport à un plan de relance ou, comme il est dit, un programme d’austérité ? Comment et pour quoi faire, notamment s’agissant d’une compression des dépenses et des déficits ?
Doit-on nous extraire, nous émanciper de la tyrannie de l’approche purement comptable et s’inscrire dans une logique de développement durable avec vision à l’appui ? Auquel cas, que faire pour relancer l’investissement public et privé ?
Quels types de réformes doit-on engager pour retrouver la confiance et libérer
la croissance ? Réforme de l’État, de la fiscalité, mettre en oeuvre des politiques publiques et sectorielles.
Une politique monétaire plus accommodante, une baisse du TMM. Une fois qu’on a dit cela, reste cette lancinante question, et c’est notre question 3. Comment financer cette relance dans l’immédiat, tout en honorant nos engagements en matière de remboursement du service de la dette ?
(L’Économiste Maghrébin N°831 du 10 au 24 Novembre 2021)