Le partenariat public-privé, plus connu sous le PPP, est discrédité pour certains. Pour d’autres, ce modèle est un moteur de développement. Il permet de relancer l’investissement public comme privé et la création d’emplois dans plusieurs secteurs.
Ce modèle a connu une réussite en Europe, particulièrement en Grande-Bretagne dans les années 90, puis lancé en France en 2004. En novembre dernier, la Tunisie s’est dotée d’une loi sur les contrats de partenariat, qui comprend le volet contractuel des PPP. Mais dans le contexte tunisien, l’administration tunisienne est-elle bien outillée pour passer au partenariat public privé ? Telle était la problématique d’un débat organisé hier par l’Atuge sur les « Contrats de partenariat ».
Pour Atef Majdoub, chargé de mission au cabinet du président du Gouvernement, il faut faire la différence entre la loi relative aux contrats PPP et le PPP. « La loi porte sur les contrats PPP et ce ne sont pas les PPP, d’où la grande différence. Or le PPP est un vocabulaire qui est beaucoup plus étendu, contrairement aux contrats PPP qui sont en l’occurrence spécifiques. Cela veut dire que le PPP comporte une forme institutionnelle et une forme contractuelle », a-t-il précisé.
Evoquant le PPP institutionnel, M. Majdoub a tenu à préciser que « pour l’exemple, la Steg internationale est la conjonction entre deux entités : la Steg détient 50% d’actions et les privés 50%, sous le régime du PPP institutionnel qui n’a pas besoin d’un cadre juridique pour s’installer. Mais dans ce mode de fonctionnement du PPP, il y a ce qu’on appelle la concession, une nouvelle forme de partenariat public-privé qui concerne les secteurs marchands comme la construction des ports ou des aéroports. Dans ce cas, le concessionnaire se fait payer par les usagers et il peut réaliser une rentabilité et l’Etat dans ce cas de figure n’intervient pas. Le régime de concession est régi par une loi propre à lui, datant d’avril 2008. La nouveauté est la loi des contrats du PPP ».
Interrogé sur le modèle inspiré d’expériences étrangères, M. Majdoub a recommandé qu’ « on doit s’inspirer des expériences étrangères des bonnes pratiques tout en l’adaptant au contexte tunisien. Le contrat PPP est un contrat global. Il comporte la conception, le financement, la réalisation et l’exploitation. Dans le cas de la Tunisie, nous n’avons pas le volet de l’exploitation. Le régime des concessions permet l’exploitation. Nous aurons des modes de fonctionnement qui se complètent et ceci pour déterminer le mode optimum le mieux adapté à la réalisation des investissements ». Et d’ajouter que la construction des hôpitaux et des prisons pourrait faire un bon exemple de partenariat public privé. Le PPP est un mode complémentaire aux autres modèles de développement. Il contribuera certes au rééquilibre au niveau des régions, mais surtout à la concrétisation de l’article 12 de la Constitution relatif au rôle de l’Etat qui doit renforcer la justice sociale, le développement durable, l’équilibre entre les régions et une exploitation rationnelle des richesses nationales en se référant aux indicateurs de développement et en se basant sur le principe de discrimination positive. L’Etat doit veiller également à la bonne exploitation des richesses nationales.
Rôle de l’administration
Pour Ahmed Bouzguenda, président de l’IACE , l’acheteur public aujourd’hui n’est pas bien outillé pour mettre en œuvre ce contrat de partenariat parce qu’on n’est pas encore habitué à ce mode de financement. Cependant, avec cette loi, l’acheteur public doit avoir, avant de lancer des projets en PPP, des capacités de building. Il faut être bien outillé pour signer des contrats PPP. La bonne préparation de l’acheteur public à ce mode de commande publique est cruciale. Il faudrait que l’administration se prépare à mieux professionnaliser ses agents pour que l’acheteur puisse utiliser ce mode d’achat public. Et d’ajouter que beaucoup d’expériences pour certains pays ont essuyé un échec dû à un manque de préparation des parties contractantes.
Et de poursuivre : « Les projets du PPP s’étendent sur de longues périodes parce que cela nécessite des investissements très lourds surtout quand il s’agit de projets d’envergure. Le PPP sert à financer des projets d’infrastructure, mais ce type de contrats ne remplace jamais la commande publique ou encore le marché public pour pouvoir donner une diversité à l’acheteur public« .
Sur le plan juridique, les contrats PPP sont bien structurés, mais la répartition des risques devrait être bien étudiée, « parce qu’un contrat PPP qui réussit, ce n’est pas un contrat qui transfère le risque du privé au public et vice-versa. Chacun doit calculer d’avance les risques qui pourraient se présenter durant toutes les phases de la réalisation d’un projet sous le contrat PPP. »
Il conclut : « C’est un bon modèle pour booster l’investissement. Toutefois, il ne faudrait pas en abuser. Tout dépend de la nature du projet et de la capacité de l’administration à le mettre en œuvre« .