Le Forum de l’Économiste 2025 Mardi 20 mai « La Tunisie face à la nouvelle donne économique mondiale » « Quelles options stratégiques à l’heure de l’IA ? »
Merci, un grand merci du fond du cœur pour avoir répondu à notre invitation de si belle manière. Je voudrais vous dire toute ma joie de vous accueillir toujours aussi nombreux, en dépit de vos charges et de vos obligations professionnelles.
Et vous réaffirmer tout l’intérêt pour nous d’échanger et de débattre d’un sujet au premier rang des préoccupations mondiales.
Dans le nouveau contexte mondial marqué par de rapides évolutions géopolitiques, nous sommes -une fois de plus- confrontés à d’énormes défis. C’est pourquoi nous avons chois pour thème central :
« La Tunisie face à la nouvelle donne économique mondiale ».
Avec cette ultime question « qu’elles sont les options stratégiques à mettre en œuvre à l’heure de l’IA ». Et c’est précisément cette question qui sera au cœur de notre problématique.
En vérité, la question du changement, voire du basculement géopolitique n’est pas nouvelle. Nous en avons débattu ici-même, à plusieurs reprises. Sauf que l’attaque tous azimuts lancée par le président Donald Trump, dès son investiture, contre le multilatéralisme a accéléré le processus et amplifié son échelle de gravité.
La guerre des tarifs douaniers, dont il n’a exclu aucun pays, a mis le monde en ébullition. Et provoqué un choc terrible et des réponses plus ou moins mesurées. En voulant rendre sa puissance à l’Amérique, qui n’a jamais été aussi puissante, le président américain s’en est pris à ses alliés au même titre qu’il a déclaré la guerre à la Chine, l’ennemi stratégique.
Il a plongé, le monde dans le chaos. Les nouveaux tarifs douaniers, s’ils venaient à être appliqués, vont freiner les échanges commerciaux. La guerre des tarifs va déclencher un climat d’incertitude et un affaissement de la croissance mondiale. L’Amérique de Trump n’en sortira pas vainqueur. Il n’a pas mis longtemps pour s’en convaincre.
Au final, l’hégémonie tout autant que l’unilatéralisme américains ont révélé leurs propres limites face à la riposte mondiale. Les principes de réalités économiques, et stratégiques, ont fini par l’emporter. L’Amérique de Trump semble gagnée par la raison -du moins à ce niveau- moyennant quelques ajustements de tarifs douaniers, loin de faire écrouler toute l’architecture de l’économie mondiale.
Il n’empêche ! L’alerte aura agi comme un véritable détonateur, un accélérateur et un amplificateur des évolutions géopolitiques qui ne sont pas sans conséquence pour notre économie.
Ce basculement géopolitique aux effets diffus et aux conséquences incertaines ne saurait ni ne devrait remettre totalement en question nos anciens repères géostratégiques et moins encore notre ancrage dans l’espace euro-méditerranéen, fondé à la fois sur des considérations historiques, géographiques et culturelles.
L’UE, notre principal partenaire, a beau s’élargir d’Est en Ouest, elle est et restera notre principal partenaire économique, commercial et financier. L’Accord d’association signé en 1995, en dépit de ses insuffisances et de ses zones d’ombre, en est l’illustration. Sauf que cet accord ne répond plus aujourd’hui, trente ans après, aux aspirations et aux besoins de l’économie tunisienne.
L’Accord de 1995 relève plus d’un accord de libre-échange aux effets largement asymétriques qu’il ne met en place un véritable partenariat fondé sur une communauté d’intérêt de chaque instant et d’un destin partagé.
La Tunisie est aujourd’hui à un tournant décisif de son histoire. Elle peut se prévaloir de la richesse de ses talents, de la résilience et de la vitalité de son tissu économique. Elle a la prétention et l’ambition de se positionner sur la scène internationale à travers le redéploiement mondial des chaînes de valeur.
Seul bémol : pour pouvoir peser, voire compter dans le monde, il faut y être. L’ennui, c’est qu’on est beaucoup moins catégorique à cet égard. Les difficultés des transitions politiques et économiques sont passées par là.
Monsieur le ministre, Excellences, mesdames et messieurs,
Quelles options stratégiques à l’heure de l’IA devrons-nous mettre en perspective et avec quels moyens et quels supports technologiques ? À ce stade de l’analyse, le rôle de l’IA paraît central. Elle n’est plus une promesse ou une option mais déjà une réalité, une nécessité. On sait qu’elle va transformer de manière radicale notre système de pensée, notre mode de produire, de consommer, de soigner et de nous déplacer.
Elle nous permet d’accélérer la modernisation de notre économie. Et elle nous offre l’opportunité de construire une croissance forte, durable et souveraine. C’est pourquoi l’IA doit être au cœur d’un partenariat tuniso-européen rénové tourné vers l’innovation et la responsabilité. L’objectif étant de préserver et de consolider notre avantage compétitif, ne serait-ce qu’au niveau des chaînes de valeur qui dominent aujourd’hui le paysage industriel tunisien.
J’entends par là, au-delà de l’industrie textile, les filières notamment celles des composants automobiles et aéronautiques, de l’industrie pharmaceutique et des services financiers. C’est d’ailleurs à dessein que les trois dernières filières font l’objet de trois panels conçus et programmés à l’effet de nous éclairer sur la manière dont l’IA peut-en améliorer l’efficacité, le développement et la pérennité.
Je suis sûr que nos conférenciers et nos panélistes, que je remercie, nous diront comment et à quel point le levier stratégique qu’est l’IA participe à la résilience, la compétitivité et la souveraineté dans un contexte marqué par les turpitudes géopolitique.
Excellences, mesdames et messieurs,
La guerre des tarifs douaniers s’achève avant même de commencer. La fièvre est tombée mais l’incertitude demeure. Quelle direction prendre ? Quelles options stratégiques choisir ? Et avec quels partenaires ?
L’émergence du Sud global, mené par la Chine, a changé la donne. La route de la soie est jalonnée d’offres de partenariat stratégique à la fois crédibles et opportunes.
Quoi qu’il en soit, une chose est certaine : il faut accompagner cette transformation par une volonté d’agir et avec détermination. En redonnant l’envie d’investir aux chefs d’entreprise, en stimulant la créativité des startups poussées au départ dès la première levée de capitaux. Et en créant des conditions de vie et de travail décentes pour freiner l’exode de nos compétences jeunes et moins jeunes.
Pour donner corps et chair aux options stratégiques à l’heure de l’IA. Et ça sera ma conclusion : il faut de l’audace, de la solidarité. Il faut construire la confiance en injectant de la sérénité et de l’apaisement sous toutes ses formes. Pour faire face aux défis des évolutions géopolitiques, il n’y a pas mieux que l’union. Il n’y a plus de temps à perdre. Pour ouvrir un nouveau chapitre dans notre parcours industriel. Un chapitre porté par l’innovation et la responsabilité.
Merci de votre attention.