Le président de la Commission des finances de l’Assemblée des représentants du peuple et député du Front populaire Mongi Rahoui, donc de l’opposition, a déclaré que « le projet de la loi de finances 2018 en Tunisie est le budget qui comporte d’importantes hausses et sera un lourd fardeau pour le citoyen tunisien…Ce budget sera un des facteurs de l’explosion sociale dans le pays” (déclaration du 6 novembre 2017).
De fait, le budget 2018 semble mettre à l’épreuve l’équation gouvernementale. L’UTICA a exprimé son opposition, menaçant de se retirer de l’Accord de Carthage, alors que l’UGTT maintient ses demandes d’augmentations de salaires pour 2018 et son refus catégorique de toute idée de privatisation des institutions nationales.
D’autre part, le parti Afek Tounes a critiqué le budget, alors que les deux grands alliés, membres du gouvernement de « l’union nationale, » Ennahdha et Nida, ont exprimé leurs réserves.
Est-ce à dire que l’adoption du projet de la loi de finances 2018 dans sa mouture actuelle sera difficile ? Nous ne le croyons pas. Ces protestations de principe – opération de communication – semblent plutôt destinées à attester leur prise de distance d’un budget marqué par sa pression fiscale et son occultation de la question du pouvoir d’achat. Source d’inquiétude également, le taux de l’endettement (environ 70%).
L’équation gouvernementale a été définie par le document de l’Accord de Carthage, signé mercredi 13 juillet 2016, au palais présidentiel, par diverses formations politiques (le mouvement Ennahdha, Nida Tounes, le mouvement Projet de la Tunisie, l’UPL, Afek Tounes, le mouvement Echaab, le parti Al Moubadara (l’Initiative), Al-Jomhouri et Al Massar) et de trois organisations nationales, à savoir l’Utica, l’Ugtt, et l’Utap.
Cet accord s’articule autour de six axes fondamentaux, à savoir la poursuite de la guerre contre le terrorisme, l’accélération du processus de croissance pour atteindre les objectifs de développement et d’emploi, la lutte contre la corruption et l’instauration des fondements de la bonne gouvernance, la maîtrise des équilibres financiers et la poursuite d’une politique sociale efficace, l’instauration d’une politique spécifique pour les villes et les collectivités locales, le renforcement de l’efficacité de l’action gouvernementale et la poursuite de la mise en place des institutions opportunes.
Chose évidente, la feuille de route, mise au point par les partis ayant soutenu l’initiative présidentielle relative au gouvernement d’union nationale, ne définit pas les moyens de sortie de la crise socio-économique. Pourrait-elle prendre la juste mesure du grand défi que lui pose le quotidien !
La conjoncture était certes difficile. La laborieuse gestion gouvernementale n’a pas répondu aux attentes exprimées lors de la révolution ? Le pouvait-elle dans ce contexte de récession évidente ? Les dossiers en attente sont graves et complexes : endettement, blocage du développement, déclin évident du tourisme, dégradation du commerce extérieur. Le gouvernement n’a pas de solution miracle, susceptible de répondre, dans les meilleurs délais, au défi. Au mieux, la Tunisie est en début de convalescence. La tâche est immense et nécessitera pour l’exécutif, qui peine à faire passer son message, beaucoup de courage, de persévérance et de résistance. Il devrait accélérer le tempo.
Vérité de La Palice, le slogan de tous les citoyens du monde réclame “moins d’impôts et plus de pouvoir d’achat”. Le budget 2018 répondrait difficilement à cette exigence absolue et utopique. Comment réagirait le citoyen plutôt désillusionné par les effets vécus après “la révolution”, qui constitue son acquis ? La question reste ouverte.