C’est un fait sans précédent dans l’histoire de France : un ancien président de la République va être emprisonné. Reconnu coupable d’« association de malfaiteurs » par le tribunal correctionnel de Paris, Nicolas Sarkozy a été condamné à cinq ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt à effet différé, assorti de l’exécution provisoire. Une condamnation exceptionnelle liée à l’affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle de 2007. Une affaire qui a aussi une résonance pour les libyens et l’ensemble des populations de la région du Sahel qui paient encore aujourd’hui l’intervention militaire de 2011 initiée par ce même Nicolas Sarkozy contre le régime de Mouammar Kadhafi.
En effet, l’affaire du financement de sa campagne électorale pourrait être en lien avec l’intervention militaire qui a déstabilisé la région.
L’affaire du financement de sa campagne électorale pourrait être en lien avec l’intervention militaire qui a déstabilisé la région.
Une intervention au fondement discutable
L’intervention militaire française, soutenue par les Etats-Unis et le Royaume-Uni (et par une partie de la population libyenne), se fondait sur une résolution de l’ONU. Or, les Occidentaux sont allés au-delà de la lettre du mandat onusien (qui se limitait à la protection des civils), pour obtenir la chute du régime de Mouammar Kadhafi. L’opération destinée à protéger les civils s’est transformée en une opération de renversement de régime, franchissant ainsi le cadre de la légalité internationale. Une transgression assumée par les principaux protagonistes : le primat de la puissance sur le droit transparaissait dans une tribune commune des principaux chefs d’État et de gouvernement de la coalition (Nicolas Sarkozy, Barack Obama et David Cameron), dans laquelle ils avaient explicitement demandé le départ de Mouammar Kadhafi, ce que la résolution de l’ONU n’exigeait/n’autorisait pas…
Résultat : l’opération d’ingérence a fait basculer la Libye dans le chaos, l’insécurité et l’instabilité politique, un pays en proie à la division et aux tensions claniques et tribales. Une situation interne qui a des répercussions directes sur l’environnement régional, puisque l’éparpillement des armes de l’ex-armée loyaliste et l’ancrage de foyers djihadistes ont représenté autant de sources de déstabilisation pour les voisins maghrébins, subsahariens, égyptiens, etc.
L’opération d’ingérence a fait basculer la Libye dans le chaos, l’insécurité et l’instabilité politique, un pays en proie à la division et aux tensions claniques et tribales. Une situation interne qui a des répercussions directes sur l’environnement régional, puisque l’éparpillement des armes de l’ex-armée loyaliste et l’ancrage de foyers djihadistes ont représenté autant de sources de déstabilisation pour les voisins maghrébins, subsahariens, égyptiens.
Une intervention critiquée a posteriori par les Occidentaux
Une situation dont la portée se fait encore largement sentir aujourd’hui, et pour laquelle la responsabilité politique de Nicolas Sarkozy est engagée.
Du reste, face à l’Assemblée des représentants du peuple de la République tunisienne, le 1er février 2018, Emmanuel Macron a brisé le tabou de la responsabilité de l’intervention militaire de 2011 dans la situation actuelle en Libye : « L’Europe, les États-Unis et quelques autres ont une responsabilité dans la situation en Libye (…) ». Et ce, en ayant « collectivement plongé la Libye, depuis ces années, dans l’anomie, sans pouvoir régler la situation ».
Le président Macron a ainsi sévèrement critiqué la décision de l’OTAN, poussée par la France, d’intervenir militairement en Libye : « L’idée qu’on règle la situation d’un pays de façon unilatérale et militaire est une fausse idée ».
Du reste, le président Barack Obama a reconnu que « cet épisode libyen a été la pire erreur de [s]on mandat ».
Ainsi, si l’affaire Sarkozy a une résonance franco-française, sa portée est aussi internationale du fait des conséquences de l’intervention militaire de la France en Libye, qui, dans la lignée de l’intervention anglo-américaine en Irak (2003), a ouvert la voie au désordre mondial actuel marqué par la loi du plus fort.
Quant au Royaume-Uni, un rapport parlementaire rendu public en septembre 2016 critiquait les réelles motivations de l’opération militaire et ses conséquences (géo)politiques.
Ainsi, si l’affaire Sarkozy a une résonance franco-française, sa portée est aussi internationale du fait des conséquences de l’intervention militaire de la France en Libye, qui, dans la lignée de l’intervention anglo-américaine en Irak (2003), a ouvert la voie au désordre mondial actuel marqué par la loi du plus fort…