La Haute Cour du Kenya a suspendu temporairement, le 12 décembre, un accord de coopération sanitaire avec les États-Unis, suite à des allégations selon lesquelles cet accord exposerait des informations médicales sensibles concernant des personnes dans ce pays d’Afrique de l’Est à un accès illégal.
Ce pacte quinquennal, signé à Washington le 4 décembre, représente plus de 1,6 milliard de dollars et a été présenté par les deux gouvernements comme un nouveau modèle d’aide sanitaire américaine qui achemine les fonds directement vers les institutions étatiques tout en incitant les partenaires à augmenter les dépenses de santé nationales.
Cependant, la Fédération des consommateurs du Kenya (COFEK), une organisation à but non lucratif, a déposé une requête auprès de la Cour constitutionnelle, avertissant que l’accord pourrait permettre aux États-Unis d’accéder à des dossiers médicaux personnels, y compris le statut VIH.
Dans un communiqué publié mercredi 10 courant, COFEK a déclaré qu’une partie de l’accord manquait de clarté et devrait être expressément définie ou supprimée. L’organisation a fait valoir que l’accord exposait les ressortissants kenyans à des violations durables de leur vie privée, à une stigmatisation et à un risque d’utilisation abusive de leurs informations.
« Le Kenya doit coopérer avec audace mais se défendre farouchement : le partenariat ne doit pas se traduire par un abandon de souveraineté, des droits des consommateurs ou du contrôle des données nationales de santé », a déclaré le groupe de pression.
Dans une ordonnance rendue publique, le juge Bahati Mwamuye a ordonné la suspension de toute partie de l’accord impliquant le transfert ou le partage de données personnelles de nature médicale, épidémiologique ou sensible jusqu’à une audience le 12 février 2026.
Le président kényan William Ruto a cherché à rassurer le public sur le fait que le droit national régirait le traitement des données des citoyens, affirmant que le procureur général avait examiné l’accord « minutieusement » pour s’assurer que de l’existence de garanties.
Le Rwanda, le Lesotho, le Libéria et l’Ouganda auraient conclu des accords similaires avec Washington.
Plus de cinquante organisations de la société civile ont mis en garde, dans une lettre ouverte adressée aux chefs d’État et de gouvernement africains, contre le risque que les accords d’aide sanitaire proposés par les États-Unis « portent atteinte à la souveraineté » en accordant à Washington un « accès étendu » aux systèmes nationaux de données sanitaires et aux informations sur les agents pathogènes. Elles ont souligné que les conditions de ces accords pourraient comporter des garanties insuffisantes en matière de protection de la vie privée et de sécurité, et n’offrir aucune garantie de réciprocité, notamment en ce qui concerne les vaccins, les transferts de technologies ou la production locale.