La Banque mondiale revoit sa stratégie en Afrique. Désormais, l’impact sur l’emploi devient un critère central dans l’évaluation de ses projets. Qu’il s’agisse de santé, d’éducation, d’énergie ou de numérique, tous les programmes seront jugés à l’aune de leur capacité à créer des emplois durables et améliorer les moyens de subsistance.
Il s’agit là sans d’un important changement de paradigme mis en lumière dans un article récent de l’institution de Bretton Woods, qui s’appuie sur cinq études de cas en Zambie, Maroc, Madagascar, Côte d’Ivoire et Guinée-Bissau.
Objectif : démontrer, preuves à l’appui, que des réformes ciblées peuvent produire des résultats rapides et tangibles.
Zambie : des subventions qui changent des vies
En Zambie, par exemple, des programmes combinant transferts monétaires, formations professionnelles et mentorat ont permis une réduction de 30 % de l’extrême pauvreté parmi les femmes rurales, et une hausse spectaculaire de 80 % des revenus des micro-entreprises.
Résultat : une amélioration directe de l’autonomie économique et une montée en puissance de l’entrepreneuriat féminin, selon la BM.
Maroc : la santé comme levier d’emploi
Le Maroc, lui, transforme sa réforme de la couverture santé universelle en moteur d’emploi. En effet, en plus d’améliorer l’accès aux soins, la nouvelle gouvernance du secteur a généré de nouveaux postes pour les professionnels de santé et dynamisé l’investissement privé. Le pays illustre ainsi comment une politique sociale peut devenir un pilier économique, se félicite la Banque mondiale.
Madagascar : rigueur budgétaire et croissance inclusive
À Madagascar, la maîtrise de la dette publique a libéré des ressources pour des investissements dans les infrastructures, créant des milliers d’emplois dans le BTP et les services associés. La Banque mondiale y voit un exemple de bonne gestion macroéconomique tournée vers le développement inclusif. Cependant, ces investissements ne semblent pas avoir produit de bons résultats, comme le démontrent du reste les manifestations des jeunes et moins jeunes – la Gen Z – de la grande île.
Côte d’Ivoire : l’énergie comme accélérateur économique
Grâce au soutien de l’IFC (SFI en français) et de la MIGA, la Côte d’Ivoire a étendu son réseau électrique, générant à la fois des emplois directs dans la construction et des effets multiplicateurs sur l’ensemble de l’économie. L’accès fiable à l’électricité ouvre de nouvelles perspectives aux PME, aux ménages et à l’économie numérique.
Guinée-Bissau : le numérique comme outil d’inclusion
Enfin, en Guinée-Bissau, les investissements dans le numérique ont permis de tripler le taux de pénétration en quatre ans. Résultat : un essor de la finance mobile, di e-commerce et des emplois numériques, notamment dans les zones rurales jusque-là isolées.
Un tableau de bord pour responsabiliser tous les acteurs
Au cœur de cette nouvelle approche, le tableau de bord 2025 de la Banque mondiale mesure l’impact réel des projets sur l’emploi. L’institution de Bretton Woods ne veut plus seulement compter les emplois créés, mais s’assurer qu’ils soient décents, durables et inclusifs.
Pour les gouvernements africains, cela signifie prioriser les réformes structurelles (fiscales, éducatives, réglementaires). Pour le secteur privé, cela ouvre de nouvelles opportunités d’investissement, notamment dans l’économie verte et digitale. Pour les citoyens, enfin, cela doit se traduire par des améliorations concrètes de leur quotidien.
Un appel à l’action collective
La Banque mondiale le souligne : les réussites existent, mais restent fragmentaires. Les défis sont colossaux – inégalités persistantes, enfants sans compétences de base, recettes fiscales faibles dans une majorité de pays. Mais les solutions sont connues et les outils existent.
Le mot d’ordre est clair : chaque politique, chaque investissement, chaque réforme doit désormais répondre à une seule question essentielle : « Comment cela améliore-t-il les moyens de subsistance des populations ? »
Comme le résume Ajay Banga, président de la Banque mondiale : « Le travail n’est pas fait tant qu’il n’y a pas d’emplois ».