Dans un récent post, Hamdi Hached, ingénieur en environnement, spécialiste du changement climatique et Senior Program Manager auprès de Fondation Friedrich Naumann attire l’attention sur une situation alarmante révélée par la carte publiée par le centre CEAM le 23 juin 2025.
Celle-ci montre une vague de chaleur marine sans précédent qui frappe l’ensemble du bassin méditerranéen, en particulier l’ouest et les côtes nord du pays. De vastes zones marines apparaissent en noir et rouge foncé, correspondant à la catégorie 4, indiquant des températures de surface dépassant de plus de 3 degrés Celsius la normale sur une longue période. Les côtes nord de Tabarka à Bizerte jusqu’à Hammamet, sont classées entre les catégories 3 et 4, signe que la mer n’arrive plus à se refroidir, et que les courants chauds sont désormais la règle.
Hamdi Hached souligne que ce phénomène n’est pas un simple épisode saisonnier. Les vagues de chaleur marines se sont multipliées de façon significative ces vingt dernières années. Une étude publiée dans Nature Communications en 2021 confirme que le nombre de jours où la mer dépasse ses températures habituelles a augmenté en moyenne de 20 jours par an. L’été 2025, comparé à ceux de 2022 et 2023, est plus étendu, plus long, et touche désormais une plus grande partie de l’Afrique du Nord avec une intensité inédite.
Les données satellitaires (Sentinel-3 et Copernicus Marine) indiquent des températures de surface atteignant 29 à 30 degrés, ce qui affecte directement la biodiversité marine et la pêche côtière, principale source de revenus pour des milliers de familles. Hamdi Hached rappelle que les poissons sensibles aux températures modérées, comme la sardine et le mulet, migrent vers le nord ou en profondeur, réduisant les stocks locaux. Le corail meurt, tandis que les algues toxiques prolifèrent, consommant l’oxygène et étouffant la vie marine, comme observé à Ksibet Mediouni. Par ailleurs, les salines de Sfax et Gabès subissent une évaporation excessive, modifiant la chimie de l’eau et compliquant les opérations d’extraction.
Selon Hamdi Hached, les causes sont évidentes : le changement climatique mondial a fait de 2024 l’année la plus chaude jamais enregistrée, et l’été 2025 s’inscrit dans cette tendance avec une vague de chaleur terrestre et marine intense. Le manque de vents marins empêche la circulation des eaux froides profondes, favorisant la stagnation des eaux chaudes en surface. Enfin, un ciel dégagé et peu nuageux a permis au soleil de chauffer la mer pendant des semaines sans interruption.
Face à cette situation, Hamdi Hached insiste sur la nécessité d’instaurer un système d’alerte maritime, une surveillance thermique rigoureuse des eaux territoriales, et d’adapter les stratégies de pêche aux évolutions biologiques constatées.
Il rappelle que le changement climatique n’est plus un danger lointain, mais une réalité qui se manifeste aujourd’hui, sous nos yeux, dans nos mers, et qui lance une alerte économique et environnementale majeure.