La Banque centrale est aujourd’ hui au cœur de l’actualité. Il y a d’abord ce débat autour de l’indépendance de la banque et ce fameux article 25. Il ya cette baisse de 50 points de base sur le taux d’intérêt, dont certains disent que c’est très peu et trop tard. Pour parler de tout cela, qui mieux que Mohamed Salah Souilem, ancien Directeur Général de la Politique Monétaire au sein de la BCT, pour démêler le vrai du faux. En bonne connais- sance des choses, il nous parlera à l’occasion des vraies priorités du pays, de l’importance de l’épargne, de l’inflation et de la dernière loi sur les chèques. On évoquera tout cela, même si pour lui, le vrai débat, c’est comment rétablir l’équilibre des finances publiques, booster l’investissement et créer de la croissance.
Pour rester avec la BCT, que pensez-vous de la dernière baisse du taux d’intérêt ?
Si la BCT a baissé le taux directeur, c’est qu’elle commence à croire en une meilleure maîtrise de l’inflation. Je pense qu’elle a réussi à le faire jusque là. Par ailleurs, je pense que la Banque centrale de Tunisie accorde de plus en plus de l’importance au maintien d’un taux d’intérêt réel( taux d’intérêt moins l’inflation)positif de manière à encourager l’épargne et partant du fait que l’argent facile ne peut créer que des investissements non rentables.
La baisse de 50 points de base, bien qu’elle soit jugée très faible par certains, c’est avant tout un signal fort lancé par la BCT au marché. C’est un signal que l’inflation est en voie d’être maîtrisée. C’est le signal aussi qu’on croit à des perspectives positives pour l’économie tunisienne. Et c’est raisonnable de le croire, vu les dernières pluies enregistrées. C’est l’annonce d’une bonne saison agricole en perspective. C’est, du moins, ce qu’on peut lire dans le dernier rapport sur l’évolution de la conjoncture économique et monétaire de la BCT.
Une petite baisse d’inflation. Il n’empêche, de l’avis général, que les prix résistent.
C’est vrai. Cela a été mentionné aussi dans le dernier rapport. Cela concerne notamment les produits alimentaires frais. Mais encore une fois, je pense qu’avec les dernières pluies, il y aura forcément une baisse.
A 6% du PIB, l’épargne est en berne. Comment peut-on la relancer ?
On doit d’abord savoir que l’épargne nationale ne concerne pas seulement les ménages. L’essentiel de l’épargne nationale, c’est l’épargne de l’Etat, surtouts’il parvient à réaliser un solde budgétaire primaire positif et que la situation financière des entreprises publiques est dans un meilleur équilibre financier, ce qui n’est malheureusement pas le cas actuellement. Mais aujourd’hui, les entreprises qui finançaient auparavant l’épargne, sont épuisées. Par ailleurs, je pense profondément qu’on ne peut améliorer l’épargne nationale sans un meilleur équilibre des finances publiques couplé à la réforme des entreprises publiques, pour que l’Etat puisse dégager un solde budgétaire primairepositif. Ce solde demeure actuellement dans un territoire négatif et cela depuis plusieurs années déjà…bien qu’on a observé un léger mieux ces dernières années… C’est là un chantier sur lequel on doit travailler. C’est beaucoup plus urgent que de réformer les statuts de la BCT. C’est l’épargne qui boostera l’investissement et c’est l’investissement qui créera de la croissance.
Extrait de l’interview qui est disponible dans le mag de l’Economiste Maghrébin n 918 du 23 avril au 7 mai 2025