Longtemps, les scientifiques ont cru que les chats avaient suivi les premiers agriculteurs du Néolithique en Europe, attirés par les rongeurs des greniers à grains. Mais deux études révolutionnaires révèlent une histoire bien différente : les félins domestiques seraient arrivés bien plus tard et leur véritable berceau ne serait pas le Moyen-Orient… mais la Tunisie.
Menées par les universités Tor Vergata (Rome) et Exeter (Royaume-Uni), ces recherches s’appuient sur des analyses génétiques et archéologiques poussées. Elles identifient deux vagues majeures d’expansion. La première, au IIᵉ siècle av. J.-C., voit des chats sauvages d’Afrique du Nord débarquer en Sardaigne. La seconde, sous l’Empire romain, diffuse des félins aux traits génétiques proches des races modernes à travers l’Europe – tous descendant de lignées tunisiennes.
Une découverte qui bouscule les certitudes : contrairement aux idées reçues, les chats ne sont pas apparus en Europe avec l’agriculture; mais des millénaires plus tard, portés par le commerce et les empires. Des ossements analysés en Grande-Bretagne attestent même de leur présence dès l’âge du fer, bien avant l’apogée romaine.
Des dieux et des chats
Mais pourquoi ces animaux ont-ils conquis le continent? Loin de se limiter à leur rôle de chasseurs de rongeurs, leur expansion serait liée à leur symbolisme sacré. En Égypte, ils incarnaient la déesse Bastet; chez les Romains, ils accompagnaient Diane. Tandis que les Vikings les associaient à Freya. Ces croyances, bien plus que leur utilité, auraient favorisé leur diffusion.
En bouleversant l’histoire de la domestication, ces études révèlent aussi un héritage insoupçonné : les chats tunisiens, voyageant sur les routes antiques et les drakkars vikings, ont finalement conquis le monde… Portés par les mythes autant que par les hommes.