Après avoir longtemps cru en l’ombre protectrice des États-Unis, l’Europe se retrouve aujourd’hui face à un réveil brutal. Les néoconservateurs américains ont perdu leur influence et l’Amérique se recentre sur ses priorités intérieures et la zone Asie-Pacifique. Sans le parapluie sécuritaire américain, l’Europe doit reprendre ses esprits et changer de paradigme stratégique. C’est ce qu’a souligné l’analyste politique et ancien ambassadeur Elyes Kasri.
« Après s’être laissé intoxiquer par la verve hallucinatoire des néoconservateurs et l’illusion de l’empire millénaire de l’unilatéralisme américano-globaliste, l’Europe a beaucoup de peine à remettre les pieds sur terre et à prendre conscience que les Etats-Unis d’Amérique ne veulent plus de ce statut impérial et préfèrent recentrer leur énergie sur leur front intérieur et accessoirement la zone Asie-Pacifique.
Ayant progressivement démantelé ou réduit son industrie militaire et sans le parapluie sécuritaire américain notamment le réseau de communication Starlink, les F16, les batteries Patriot et l’illusion de la défense collective otanienne, l’Europe devra reprendre rapidement ses esprits et changer de paradigme stratégique avec une révision fondamentale de sa doctrine sécuritaire et un retour à une Europe européenne ou comme l’a prémonitoirement dit le général De Gaulle une « Europe de l’Atlantique à l’Oural ».
En dépit des fanfaronnades irréalistes à la limite du ridicule, à Bruxelles, Paris et Londres et en l’absence du parapluie sécuritaire américain, l’Europe ne pourra désormais plus se permettre de tourner le dos à la Russie ou l’antagoniser. Elle devra se résoudre à engager avec la Russie un dialogue dénué d’arrière-pensées atlantistes et néo-conservatrices désuètes, afin de construire une nouvelle architecture européenne de sécurité et de coopération avec une Russie partenaire et non pas adversaire.
Si elle veut rester un acteur international pertinent, l’Europe devra mettre sur pied une nouvelle OSCE (organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) épurée des arrière-pensées de l’époque post guerre froide. Tout en assumant pleinement le décalage des rapports de force technologique, industrielle et militaire avec la Russie et la zone Asie-Pacifique. Ou se condamner à une confrontation ou au mieux à une nouvelle guerre froide qui ne pourra avoir pour dénouement que l’accélération de sa décadence et son insignifiance sur l’échiquier international. »
Autrement dit, pour rester pertinente sur la scène internationale, l’Europe doit créer une nouvelle OSCE, débarrassée des réflexes de la guerre froide. Cela signifie reconnaître le décalage des forces avec la Russie et la zone Asie-Pacifique, ou risquer une nouvelle guerre froide qui ne pourrait que précipiter sa décadence.
In fine, l’heure est venue pour l’Europe de se réveiller et de prendre son destin en main.