A l’occasion de son XXème Forum international, L’Economiste Maghrébin a organisé, dans la soirée du mercredi 18 avril, un diner-débat autour d’une question centrale pour la Tunisie, à savoir son positionnement par rapport à l’espace européen et ce qu’il comporte comme menaces et opportunités: « L’ALECA à l’heure des mobilités ».
C’est ainsi que le débat a réuni Patrice Bergamini, Ambassadeur et Chef de la Délégation de l’UE à Tunis, Sabri Bachtobji, secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères, Jean-Hervé Lorenzi, Président du Cercle des Economistes de France et Hichem Ben Ahmed, secrétaire d’Etat chargé du Commerce extérieur.
Une assistance fournie d’une centaine de personnes composée de responsables et de dirigeants politiques, de représentants d’institutions internationales, de chefs d’entreprise, d’académiciens et d’experts de réputation mondiale ont participé à ce débat.
Afin de tenter d’apporter un éclairage sur ce sujet, les intervenants se sont penchés plus particulièrement sur l’ALECA, sur la problématique de la mobilité(s) et ses contraintes, les menaces sécuritaires limitantes des déplacements des biens et des personnes, la pertinence de la politique de voisinage proposée et son adéquation avec les enjeux socioéconomiques, la volonté de soutenir une démocratie naissante, ainsi que la montée des difficultés financières des pays partenaires et le passage à un nouveau palier de partenariat.
Le débat a été l’occasion d’un échange croisé entre des responsables politiques des deux rives de la Méditerranée qui participent et/ou ont eu à participer dans leur parcours politique à la définition de cette politique de partenariat et à son évolution.
Aujourd’hui comme hier, on met en avant les mêmes arguments, les mêmes doléances. L’ouverture de l’agriculture et des services, dans le cadre de l’ALECA, fût-elle réfléchie, pensée et graduelle, nourrit les appréhensions, inquiétudes et réticences. Et soulève, entre autres questions, celle de la circulation et de la mobilité des personnes. Oui la mobilité dit-on ne doit souffrir d’aucune restriction… L’ALECA nous impose des restrictions, des limitations au plan de la circulation des personnes, donc de la mobilité des personnes.

« Il se dit, chez les professionnels comme au sein de la société civile, que l’UE devrait elle aussi rompre avec cette obsession sécuritaire et éviter autant que faire se peut cette confusion du genre. Les opérateurs tunisiens, tous grades et fonctions confondus, qui seraient appelés en urgence pour des interventions ponctuelles imprévues ne sont pas des migrants potentiels et ne représentent aucune menace sur la sécurité et la paix de l’Europe », conclut Hédi Mechri.
Le temps de l’action commune

Patrice Bergamini a souligné l’importance d’appuyer les réformes et fixer une feuille de route pour les prochaines années, parce que pour lui, si on ne s’attaque pas aux réformes aujourd’hui, on aura des difficultés demain.
«2018 est une année exceptionnelle à bien des égards, notamment avec le doublement de l’aide européenne à la Tunisie pour s’attaquer aux déséquilibres. C’est un investissement politique pour la Tunisie pour amortir les réformes qui ont des coûts. C’est aussi une fenêtre d’opportunités. L’ALECA est conçu pour cela. Cet accord est bénéficiaire pour l’économie tunisienne», précise Patrice Bergamini qui a affirmé que l’ALECA offrira à la Tunisie davantage de gains de compétitivité, ainsi qu’une mise à niveau économique et renforcera le dynamisme de certains secteurs.
Au sujet de la mobilité, l’Ambassadeur et Chef de la Délégation de l’UE à Tunis a affirmé que l’ALECA est aussi la liberté de circulation des professionnels, des étudiants et autres. En conclusion de son intervention, Patrice Bergamini a préconisé plus d’avancées sur certains sujets pour faciliter davantage la mobilité.
La mobilité : un catalyseur de développement

Sabri Bachtobji n’a pas manqué de rappeler que l’ALECA offre des opportunités et présente des défis. L’ALECA permettra aux opérateurs tunisiens d’accéder à un marché de 500 millions de consommateurs, augmenter leurs investissements et créer plus d’emplois en Tunisie. Par contre, les défis sont liés à la fragilité socioéconomique, l’écart de développement entre la Tunisie et L’UE. C’est pourquoi, le secrétaire d’Etat a recommandé une démarché évolutive et progressive dans les négociations de cet accord qui doit être fondé sur l’accompagnement avec la mobilisation d’un appui financier et technique pour certains secteurs stratégiques comme l’agriculture. «La mobilité est un catalyseur de développement pour la Tunisie. Notre approche est globale, harmonieuse et progressive», a conclu le secrétaire d’Etat.
Négocier dans une logique économique

S’agissant de la mobilité, Hichem Ben Ahmed a recommandé qu’elle soit négociée de façon à apporter quelque chose d’important dans une logique économique parce qu’il s’agit d’un problème d’équité économique.
Jean-Hervé Lorenzi, Président du Cercle des Economistes de France, a déclaré que l’ALECA est un bon terrain de réflexion et une clé formidable de confiance et de sortie de discours tuniso-tunisiens. «C’est la solution pour régler des problèmes macro-économiques», dit-il.
A ce titre, Jean-Hervé Lorenzi a proposé de faciliter l’octroi des visas pour les professionnels et les étudiants, de renforcer l’aide européenne à la Tunisie et d’accorder plus d’importance à la formation continue et à l’innovation.
