Avons-nous fait le tour de la question sur les négociations entre l’Union européenne et la Tunisie concernant l’Accord de Libre Echange Complet et Approfondi (ALECA)? Cela fait des mois qu’on en parle sans pour autant arriver à des solutions concrètes.
C’est au tour de la conférence organisée dans la journée du 18 septembre par l’association Solidar, en collaboration avec le Global Progressive Forum, d’aborder le sujet, avec comme thématique : « Pour une vision progressiste des accords commerciaux UE-Tunisie : un premier pas vers la solidarité internationale ».
Objectif : Développer une vision commune concernant les accords commerciaux entre la Tunisie et l’Union européenne en l’adaptant en faveur de la Tunisie, afin de la soutenir dans cette conjoncture socio-économique délicate.
L’évènement est de taille pour comprendre les vrais enjeux, on compte d’ailleurs un grand nombre de représentants importants de la délégation du Parlement européen, tels Pier Antonio Panzeri, président de la délégation pour les relations avec les pays du Maghreb et l’Union du Maghreb arabe et rapporteur sur l’ALECA au Parlement européen, des membres de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), ainsi que des experts et des spécialistes en économie. Entre craintes et opportunités, quelle est la part de vérité?
En revanche, force est de constater que les sphères syndicaliste et associative voient en cet accord des prémices de controverse. Ce qui entraîne, en l’occurrence, des craintes auprès de l’opinion publique. D’où l’importance de redéfinir les termes du partenariat avec l’Union européenne.
Pour les participants, l’intérêt est d’ouvrir un dialogue stratégique, afin d’élaborer un véritable partenariat profitable aux besoins de la Tunisie, durant sa phase de transition démocratique. Et ce n’est qu’en ces termes que les deux parties pourraient ainsi convenir des dispositions nécessaires quant à la libéralisation progressive et réciproque du commerce des services, conformément aux règles de l’OMC.
Sommes-nous prêts à la concurrence? Et allant plus loin dans les pistes de réflexion: quels sont les secteurs qui le sont et ceux qui ne le sont pas?
D’après Fatma Marrakchi Charfi, universitaire, le secteur des TICs, des assurances, de la finance, de la construction, sont considérés comme des secteurs prêts. Contrairement à d’autres (profession libérale, service, audit); pour la simple raison, que leur taux d’accroissement n’atteint pas la norme européenne.
Mais qu’en est-il du secteur de l’agriculture qui représente un enjeu important? Mme Marrakchi Charfi estime que si l’UE subventionne ses produits agricoles, il reste important de sauvegarder notre secteur qui représente 10% du PIB. Et d’ailleurs, les négociations pourraient ne pas être concluantes car se cachent derrière des problèmes fonciers et d’endettement qu’il faut absolument gérer. « Il faut comprendre que l’ALECA n’est pas un accord d’association conventionnel, qu’il n’est pas non plus l’accord 95 qui correspond au démantèlement tarifaire », ajoute-t-elle.
« Il faut aujourd’hui que la Tunisie crée sa propre proposition », témoigne Lobna Jeribi, présidente de Solidar Tunisie. Selon elle, les accords soumis au départ par l’UE étaient déséquilibrés. D’où la nécessité de proposer une offre tunisienne. Et ce n’est qu’à partir de là que nous pourrons dire que des pas importants ont été faits pour la mobilité, sans qu’il y ait discrimination.
Et de poursuivre: « Si nous voulons libéraliser le secteur, il est aussi important que le Tunisien puisse être mobile dans l’espace européen que son homologue européen, avec, à titre d’exemple, la reconnaissance des diplômes ».
Mehdi Ben Gharbia, ministre chargé des relations avec les institutions constitutionnelles, la société civile et les droits de l’Homme, estime que les craintes de la société civile sont légitimes, en soulignant qu’il y a un défaut de vulgarisation de l’accord de l’ALECA. Il précise dans ce contexte que cet accord est l’ultime étape d’une grande collaboration avec l’Union européenne. L’ALECAdevrait être un accord win-win sur plusieurs aspects, notamment politique et économique. « Et c’est aussi l’une des priorités du gouvernement d’union nationale de faire participer la société civile d’une manière active », confie-t-il.
Moins d’un an après l’ouverture des négociations de l’Accord de libre-échange complet approfondi, les débats entre les experts économiques, politiques, la société civile sont lancés pour promouvoir ensemble cette vision progressiste commune du projet de l’ALECA. Prendra-t-on le bon chemin? Attendons de voir…