L’objectif du blocus maritime décrété par Donald Trump contre le Venezuela serait de priver ce pays d’une partie importante de ses recettes pétrolières afin d’accélérer l’effondrement du régime de Nicolás Maduro. Tout en évitant une intervention militaire américaine au sol, aux conséquences imprévisibles.
Qui veut tuer son chien l’accuse de rage. Telle est la maxime du président américain, Donald Trump. En effet, celui-ci n’a cessé depuis des mois de viser des prétendus navires de narcotrafiquants vénézuéliens ; tout en accusant sans aucune preuve le président du Venezuela, Nicolás Maduro, d’être à la tête d’un supposé cartel de drogue.
Pourquoi tant d’acharnement contre le régime chaviste ? Derrière ses objectifs affichés de lutte contre le narcotrafic, se cache la convoitise des richesses de ce pays, qui n’est certes pas le plus grand pays producteur de pétrole; mais qui dispose en revanche des plus importantes réserves en or noir avérées de la planète devant l’Arabie saoudite et l’Iran… De quoi faire saliver le magnat de l’immobilier qui flaire les bonnes affaires, même de loin.
Un blocus maritime « total et complet »
Ainsi, le président des États-Unis a décrété, mardi 16 décembre, un blocus maritime contre les pétroliers frappés de sanctions en provenance ou à destination du Venezuela. « J’ordonne un blocus total et complet de tous les tankers sous sanctions entrant et sortant du Venezuela », a-t-il écrit sur son réseau Truth Social en lettres capitales. Ajoutant que « le Venezuela est entièrement encerclé par la plus grande armada jamais assemblée dans l’histoire de l’Amérique du Sud ».
Reprenant sa rhétorique habituelle, Donald Trump justifie le blocus américain par le « vol », par Caracas, de « pétrole, de terres et de richesses » américaines. « Le régime illégitime de Maduro utilise le pétrole de ces champs volés pour se financer, financer le terrorisme de la drogue, le trafic humain, les meurtres et les kidnappings », accuse encore le président américain. Sans toutefois fournir la moindre preuve de l’implication de Caracas dans ces supposés crimes.
Cette rhétorique fait clairement référence à l’histoire : le Venezuela a nationalisé son industrie pétrolière dans les années 1970. Et, sous la présidence d’Hugo Chávez (1999-2013), le pays a forcé les compagnies pétrolières étrangères à accepter des co-entreprises majoritairement détenues par la compagnie d’État PDVSA pour pouvoir opérer sur le territoire.
En attendant, Washington a assemblé en mer des Caraïbes une véritable armada sous l’égide du porte-avion USS Gerald R. Ford. Tout en frappant en pleine course des navires supposément liés au narcotrafic, tuant au moins 95 personnes depuis début septembre. Des opérations dont la légalité est mise en doute par des experts, ONG et responsables des Nations unies.
« Une menace grotesque »
« Incontestablement un acte de guerre. Une guerre que le Congrès n’a jamais autorisée et dont le peuple américain ne veut pas », a affirmé Joaquin Castro, le représentant démocrate du Texas.
Pour sa part, Caracas y voit « une menace grotesque ». Washington « tente d’imposer de manière absolument irrationnelle un prétendu blocus naval militaire au Venezuela dans le but de voler ses richesses ». C’est ce qu’on peut lire dans un communiqué publié par le gouvernement vénézuélien.
Frapper au portefeuille
Cela étant, il est évident que l’opération orchestrée par l’administration Trump s’inscrit dans une stratégie claire visant à affaiblir, voire destituer, le président vénézuélien Nicolás Maduro, en frappant son pays au portefeuille.
La cheffe de cabinet du président américain, Susie Wiles, n’a-t-elle pas confirmé dans un entretien à Vanity Fair, publié mardi 16 décembre, que Donald Trump « veut continuer à faire sauter des bateaux jusqu’à ce que Maduro capitule » ?
Sachant que le pays visé est soumis à un embargo américain depuis 2019. Et que le pétrole vénézuélien est écoulé sur le marché noir à des prix nettement plus bas, à destination en particulier de la Chine qui achète 80 % de la production. Or, le blocus maritime pourrait représenter pour le Venezuela une perte de revenus de 80 % des recettes publiques.
« Cette perte de revenus entraînera des pénuries qui affecteront les transports, l’alimentation, l’approvisionnement, l’agriculture et l’importation de marchandises », affirme David Goldwyn, président du cabinet de conseil Goldwyn Global Strategies et ancien fonctionnaire du département d’État sous l’administration de Barack Obama, interrogé par Politico. D’ailleurs, il s’attend à une « flambée de l’inflation et à une migration massive et immédiate de la population du Venezuela vers les pays voisins ». Le manque de revenus équivalents pour le Venezuela est estimé à 8,5 milliards de dollars par an, relèvent les experts du marché pétrolier.
Mais l’impact devrait être plus important pour la Chine, où 80 % du brut vénézuélien est acheminé via ces navires sous sanctions. Le choc sera toutefois de courte durée, poursuivent les mêmes experts. Car ils affirment que Pékin a toujours un plan B et pourrait envoyer ses propres navires chercher le pétrole.