Le Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH) 2024 dévoile un portrait détaillé de la main-d’œuvre du pays. Tout en intégrant pour la première fois un module conforme à la 19ème Conférence Internationale des Statisticiens du Travail. Cette approche modernisée permet d’évaluer avec précision l’emploi, le chômage et la sous-utilisation de la force de travail, révélant notamment d’importantes disparités entre les sexes.
Au 6 novembre 2024, la Tunisie compte près de 12 millions d’habitants, dont 50,7 % de femmes. La population en âge de travailler (15 ans et plus) s’élève à 9,24 millions, soit plus de 77 % de la population totale, une progression significative depuis 2014. La main-d’œuvre active atteint 4,45 millions, représentant 48 % des personnes en âge de travailler, avec une large majorité d’hommes (64 %) face à seulement 36 % de femmes.
Le taux de participation au marché du travail illustre une dynamique contrastée entre sexes. Alors que la participation masculine a chuté de 81 % en 1975 à 63,5 % en 2024, la participation féminine s’est améliorée, passant de 19 % à 33,6 % sur la même période, témoignant d’une lente convergence. L’éducation se révèle cruciale, avec des femmes diplômées du supérieur affichant un taux de participation de 66 %, réduisant ainsi l’écart avec les hommes.
Toutefois, les disparités persistent dans l’emploi : seulement 25,3 % des femmes en âge de travailler ont un emploi contre 55,1 % des hommes. Ces inégalités s’accentuent dans certaines régions et niveaux d’instruction.
Le chômage demeure un défi majeur, particulièrement pour les jeunes et les femmes. Le taux de chômage global s’établit à 17,2 % pour les hommes et culmine à 24,6 % pour les femmes. Les jeunes âgés de 15 à 24 ans sont les plus touchés, avec près de la moitié des 15-19 ans sans emploi. Paradoxalement, le chômage est le plus élevé chez les diplômés du secondaire. Tandis que les femmes sans instruction connaissent un chômage moins élevé mais restent très peu insérées dans le marché du travail.
Le phénomène des NEET (jeunes ni en emploi, ni en éducation, ni en formation) est particulièrement préoccupant chez les femmes de 15 à 34 ans, où il atteint 37,3 %. Une sortie anticipée des femmes de la vie active est aussi observée, avec une diminution importante du taux de participation dès 40-45 ans, contre 60 ans chez les hommes.
Cette analyse approfondie indique que, malgré une main-d’œuvre en croissance, la Tunisie fait face à une double problématique : l’intégration insuffisante des femmes sur le marché du travail et un chômage structurel élevé chez les jeunes. Le RGPH 2024 souligne que l’éducation reste le levier essentiel pour relever ces défis et favoriser une meilleure inclusion professionnelle, notamment féminine.