Dans un communiqué rendu public, l’Organisation tunisienne pour informer le consommateur (OTIC) alerte sur les défaillances structurelles du système d’assurance maladie en Tunisie, appelant à une réforme urgente et profonde de la sécurité sociale, afin de garantir un accès équitable et durable aux soins de santé pour tous les citoyens.
L’organisation met en exergue plusieurs dysfonctionnements majeurs :
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Délais excessifs de remboursement des frais médicaux, pouvant dépasser cinq mois dans certains cas ;
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Plafond annuel de remboursement jugé inadapté face à la hausse continue des coûts médicaux ;
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Manque de transparence dans la tarification des services de santé, notamment dans les cliniques et cabinets privés ;
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Part élevée des dépenses de santé supportées par les assurés, estimée entre 38 % et 40 %, soit bien au-delà du seuil de 25 % recommandé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
Un système qui pèse lourdement sur les assurés sociaux
Selon l’OTIC, les insuffisances actuelles du système poussent de nombreux assurés à reporter leurs soins, à contracter des dettes ou à recourir à des paiements échelonnés. Ce e qui contribue à l’érosion continue de leur pouvoir d’achat.
L’organisation souligne également l’inadéquation entre le plafond de remboursement et le salaire minimum garanti dans le secteur industriel (actuellement fixé à 566,512 dinars/mois), rendant la couverture santé « injuste » et inadaptée aux réalités économiques des assurés.
L’OTIC dénonce les retards injustifiés dans le traitement des demandes de remboursement; malgré la contribution préalable des assurés au financement de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM). Avec environ 3 millions de demandes de remboursement déposées chaque année, dont plus de 1 million émanant de malades chroniques ou atteints de pathologies graves, ces délais sont susceptibles de nuire gravement à la santé des patients et de violer le principe d’égalité d’accès aux soins.
L’organisation pointe aussi des pratiques tarifaires abusives dans le secteur de la santé privée. Malgré les obligations légales, de nombreuses structures médicales ne publient pas leurs tarifs, exposant les patients à des « factures surprises ». Certains prix de médicaments ou d’interventions s’écartent des barèmes officiels de la CNAM, avec des marges allant jusqu’à 300 %, comme l’a également révélé le 32e rapport annuel de la Cour des comptes.
Recommandations de l’OTIC
L’OTIC appelle donc les autorités à protéger le droit constitutionnel à la santé (article 38 de la Constitution) et propose une série de mesures urgentes :
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Réforme structurelle de la Caisse nationale d’assurance maladie ;
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Révision périodique du plafond annuel de remboursement, en lien avec le SMIG, l’inflation et le pouvoir d’achat ;
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Fixation d’un délai maximal de 15 jours pour le traitement et le paiement des demandes de remboursement ;
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Révision de la liste des maladies graves et chroniques prises en charge ;
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Accélération de la généralisation de la carte électronique « Labess », outil clé pour la modernisation et la traçabilité des services ;
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Renforcement du contrôle des structures de santé privées, en matière de transparence tarifaire et de respect des prescriptions médicales.
In fine, l’OTIC affirme que l’inaction face à ces défaillances risque de fragiliser davantage le tissu social, d’amplifier les inégalités et de compromettre les efforts nationaux pour améliorer le climat de confiance entre les citoyens et les institutions de l’État.