Selon la dernière étude de l’Institut arabe des chefs d’entreprise (IACE), intitulée « Importations : les dessous d’un trend contrasté », le déficit commercial de la Tunisie continue de creuser un fossé inquiétant. Sur les neuf premiers mois de 2025, celui-ci s’élève à 16,728 milliards de dinars, soit une augmentation de près de 3,2 milliards par rapport à la même période en 2024, d’après les chiffres de l’Institut national de la statistique (INS).
L’IACE met en évidence un phénomène double : une reprise soutenue des importations (+5,4 %) et une quasi-stagnation des exportations (+0,03 %), signe d’un déséquilibre structurel persistant dans l’économie nationale.
L’étude souligne que si la demande en produits alimentaires et énergétiques ralentit, les importations de biens intermédiaires et d’équipements industriels s’accélèrent. Cette tendance reflète un renouveau de la production nationale, mais dans un contexte encore fragile.
Le secteur agricole, par exemple, a permis un répit temporaire grâce à des récoltes abondantes et à la baisse des prix mondiaux, contribuant à un excédent alimentaire de 620 millions de dinars en septembre 2025. Les importations de céréales ont chuté de 3,5 %, et la collecte a atteint 11,78 millions de quintaux, un niveau record favorisé par des conditions climatiques favorables.
Dans le même temps, le secteur énergétique reste un point noir. La production de pétrole est tombée de 77 000 à 27 000 barils par jour depuis 2010, et celle du gaz a diminué de 9 %. La baisse des cours mondiaux du Brent (-15 %) et la dépréciation du dollar ont limité l’impact sur la facture énergétique, mais ces éléments conjoncturels ne suffisent pas à compenser la faiblesse structurelle.
L’espoir vient des biens de production
L’IACE souligne que les importations de produits intermédiaires ont progressé de 5,4 %, et celles de produits d’équipement de 22,1 %, reflétant un regain industriel tangible. Le secteur manufacturier, moteur des échanges (79 % des exportations, 71 % des importations), enregistre une reprise dans le textile, l’habillement et le cuir (+3,5 %) et dans les industries mécaniques et électriques (+15 %).
Le secteur minier suit également cette tendance : les importations de produits miniers et phosphatés ont bondi de 22,6 %, tandis que les exportations augmentent de 8 %. La production a atteint 1,8 million de tonnes au premier semestre, en hausse de 55 % par rapport à 2024, avec des ambitions de 5 millions de tonnes d’ici la fin de l’année, selon la Compagnie des Phosphates de Gafsa.
Des recommandations prudentes pour un redressement durable
L’étude de l’IACE met en garde contre un optimisme prématuré. La Tunisie reste vulnérable aux chocs externes, avec une concentration de partenaires commerciaux limitée et une spécialisation peu valorisée. Les experts recommandent de renforcer le secteur agricole, d’accélérer la transition énergétique et de diversifier les partenariats, tout en favorisant une montée en gamme dans les filières industrielles pour stabiliser durablement la balance commerciale.