« Il est inacceptable que le gouvernement prélève des contributions sans base légale claire et sans garantir les droits des travailleurs ». C’est ainsi que Romdhane Ben Amor, chargé de communication au Forum tunisien des droits économiques et sociaux (FTDES), a dénoncé, dans une déclaration à L’Économiste Maghrébin, la manière dont les autorités appliquent le fonds d’assurance contre la perte d’emploi instauré par le chapitre 17 de la loi de finances 2025.
Le FTDES avance que les employeurs et les administrations ont commencé à retenir les cotisations dès le début de l’année, alors que le gouvernement n’a toujours pas publié le décret d’application. Ce texte doit pourtant définir les bénéficiaires, les modalités de gestion et les mécanismes d’exécution du dispositif. Pour le Forum, « cette absence constitue une violation du principe de légalité » : « L’État ne peut pas imposer de prélèvements sans préciser leur champ d’application et les droits correspondants ».
Le Forum rappelle que le chapitre 17 finance le fonds grâce à une cotisation de 0,5% répartie entre l’employeur et le salarié, à des recettes fiscales issues notamment du tabac, de l’alcool et des jeux électroniques, ainsi qu’à une contribution de l’État. Malgré la tenue d’un Conseil ministériel restreint le 11 janvier 2025 pour examiner le projet de loi fixant les prestations et les conditions d’éligibilité, le gouvernement n’a pris aucune mesure concrète. Le ministère des Affaires sociales n’a communiqué aucun progrès, ce qui entretient, selon le FTDES, un flou préoccupant sur la légalité des prélèvements et sur la transparence du futur fonds.
« Nous défendons un principe clair : aucune retenue ne doit être opérée sans texte d’application, et aucune cotisation ne doit exister sans prestation clairement définie », affirme Romdhane Ben Amor. Le FTDES appelle le gouvernement à publier immédiatement le décret d’application du chapitre 17 pour régulariser les prélèvements en cours et à accélérer l’adoption du projet de loi sur les prestations afin de garantir une protection réelle aux travailleurs. Le Forum demande aussi aux autorités de clarifier le devenir de la loi n°101 de 1996 pour harmoniser les deux régimes, de revoir la répartition des contributions afin de réduire la charge qui pèse sur les salariés et de renforcer la part de l’État et des employeurs. Il invite enfin le gouvernement à instaurer une gouvernance transparente et à publier régulièrement les recettes et les dépenses du fonds.
« La protection sociale doit reposer sur la légalité, la clarté et la justice, non sur l’opacité ni sur l’improvisation », conclut Romdhane Ben Amor.