L’hôtel du Lac de Tunis, véritable chef-d’œuvre du brutaliste, conçu par l’architecte italien Raffaele Contigiani entre 1970 et 1973, a été le lieu où ont séjourné les plus grandes vedettes mondiales, dont la légende du funk James Brown. Ce bâtiment emblématique, avec sa silhouette en pyramide inversée et ses façades en béton brut et métal importé d’Autriche, représente une prouesse technique et esthétique unique, symbole fort de la modernisation de la Tunisie indépendante.
Sa structure, en acier et béton armé, repose sur 190 pieux profondément ancrés jusqu’à 60 mètres, garantissant la stabilité de l’hôtel, qui compte 10 étages et 416 chambres. Malgré des années d’abandon, il tient bon, même si aujourd’hui son état impose une restauration urgente pour protéger ce patrimoine rare, l’un des premiers exemples mondiaux d’architecture brutaliste, un style quasi inexistant ailleurs.
Aujourd’hui, un débat passionné oppose les partisans de la démolition, parmi lesquels figurent les propriétaires libyens, aux défenseurs ardents de sa réhabilitation. Mais la démolition coûterait trois fois plus cher que la rénovation, sans parler des dégâts environnementaux majeurs qu’elle pourrait engendrer. Plus encore, détruire un tel monument au cœur de Tunis pourrait avoir des conséquences graves pour la ville, à la fois sur le plan structurel et écologique, vu sa proximité avec de nombreux bâtiments et espaces sensibles.
Il est important de rappeler qu’en 2024, la Commission nationale du patrimoine et le ministère des Affaires culturelles ont décidé de protéger l’hôtel du Lac, soulignant l’importance de préserver ce joyau architectural unique.
Cette année, les récentes rumeurs de démolition ont suscité une vive inquiétude parmi les architectes et une grande partie des Tunisiens. Effacer ce monument ne serait pas seulement détruire un symbole rare à l’échelle mondiale, ce serait aussi mettre en danger la capitale elle-même.
Mais dans cette situation sensible, la voix de la raison doit l’emporter. Il est tout à fait possible de conjuguer préservation du patrimoine et rentabilité économique. Restaurer l’Hôtel du Lac en un hôtel de luxe moderne permettrait non seulement de sauver cet emblème brutaliste exceptionnel, mais aussi d’offrir un retour sur investissement important aux propriétaires libyens.
En choisissant la rénovation plutôt que la démolition, on fait preuve de sagesse, tant sur le plan économique que patrimonial. En redonnant vie à ce témoin irremplaçable du passé, nous offrons à Tunis non seulement un patrimoine précieux, mais aussi l’espoir d’un avenir vibrant