Salma Fallah est la créatrice de Gentle Ties, une marque de mode durable qui allie savoir-faire tunisien et recyclage textile. Après deux ans de réflexion et une année sur le marché, elle s’est formée au modélisme pour mieux répondre aux attentes des consommateurs tunisiens. Gentle Ties utilise principalement des cravates recyclées et collabore avec des artisans pour créer des pièces faites main, intégrant des éléments de l’identité tunisienne comme le tissage en laine. Son slogan résume parfaitement cette approche. Interview.
Comment votre engagement dans la mode éthique et durable chez Gentle Ties contribue-t-il concrètement à l’émancipation et au respect des droits des femmes ?
Salma Fallah : Chez Gentle Ties, notre mission va bien au-delà de la création d’accessoires. Nous travaillons main dans la main avec des artisanes et couturières locales, en leur offrant une source de revenus stable et en valorisant leur savoir-faire. Cette démarche permet à plusieurs femmes de s’insérer économiquement, souvent depuis leur domicile, tout en conciliant vie familiale et activité professionnelle. En privilégiant l’upcycling pour nos sacs, éventails et nœuds papillon, nous associons autonomie financière, respect de l’environnement et préservation d’un artisanat authentique.
Quels sont, selon vous, les principaux défis que rencontrent les femmes entrepreneures dans le secteur de la mode éthique, et comment les surmonter ?
Le premier grand défi auquel les femmes entrepreneures de la mode éthique sont confrontées est le financement. Ce secteur est souvent perçu par les investisseurs traditionnels comme une niche à haut risque, car il ne repose pas sur des volumes massifs et rapides comme la fast fashion. Pour y faire face, il est essentiel de diversifier les sources de financement : recours aux subventions et concours dédiés à l’économie sociale et solidaire ou à l’artisanat, partenariats avec des marques ou institutions partageant les mêmes valeurs, et système de précommandes qui réduit les coûts liés aux stocks.
Le deuxième défi est la visibilité. Dans un univers dominé par de grandes enseignes disposant de budgets marketing colossaux, il est crucial de miser sur un storytelling puissant. Raconter l’histoire des artisanes, montrer les coulisses de la fabrication, mettre en lumière l’impact social et environnemental : autant de leviers qui créent un lien émotionnel avec le public. Les réseaux sociaux visuels comme Instagram, Pinterest ou TikTok permettent de diffuser ces récits à large échelle, tandis que la participation à des marchés, pop-up stores et salons éthiques favorise la rencontre directe avec la clientèle. Les collaborations avec d’autres créateurs ou influenceurs engagés, ainsi que l’obtention de labels et certifications, renforcent encore la crédibilité et l’attrait de la marque.
Enfin, un troisième défi majeur réside dans l’éducation du consommateur. Beaucoup ignorent encore les véritables enjeux de la mode éthique et ne comprennent pas la différence de prix avec la fast fashion. Pour surmonter cet obstacle, il faut adopter une approche pédagogique : utiliser des visuels et comparatifs clairs, organiser des ateliers ou démonstrations d’upcycling pour faire découvrir la valeur du travail artisanal, et communiquer sur la durabilité des produits. En montrant que chaque pièce est conçue pour durer, tout en respectant l’humain et la planète, on transforme peu à peu la perception et les habitudes d’achat.
Le mot de la fin : quel message souhaitez-vous transmettre aux femmes tunisiennes ?
Croyez en vos rêves et respectez la nature. Suivez votre instinct de femme, cet élan unique de création et de transmission. Chacune a le pouvoir d’apporter sa pierre à un monde plus juste et plus beau : il suffit d’oser, d’agir et de rester fidèle à ses valeurs.