L’économiste Moez Hadidane a réagi, vendredi 24 janvier 2025, à la mesure récemment annoncée par la Banque centrale de Tunisie (BCT), qui oblige les banques à appliquer une réduction des taux d’intérêt sur les crédits à taux fixe. S’il reconnaît l’importance de cette décision, il alerte néanmoins sur les risques de difficultés liées à sa mise en œuvre.
Dans une interview sur Mosaïque FM, Hadidane a souligné que, bien que la loi exige cette réduction des taux, l’application de cette mesure pourrait être problématique pour les institutions financières. En effet, les banques seraient contraintes de proposer des crédits à des taux inférieurs à leurs coûts réels de financement, une situation qui pourrait s’avérer défavorable pour leur rentabilité.
L’exemple d’un crédit à taux fixe
L’économiste a illustré son propos par un exemple précis : un crédit à taux fixe de 11% sur une durée de dix ans. Si l’emprunteur demande une réduction du taux à 5,5% pour les années restantes, le coût des ressources utilisées par la banque pour financer ce crédit pourrait atteindre 6 ou 7%, un montant supérieur au taux réduit proposé. Selon Hadidane, ce genre de scénario est « très probable ».
Le modèle de financement des banques en question
Hadidane a également rappelé que les banques ne se contentent pas de dépôts à vue pour financer leurs crédits. Elles recourent à des emprunts plus coûteux sur les marchés financiers, à des prêts auprès de la BCT, ou encore à des dépôts à terme. Ces sources de financement plus onéreuses rendent la mise en œuvre de la mesure de réduction des taux encore plus complexe.
Comment les banques pourraient compenser leurs pertes
Face à ce défi, Hadidane a estimé que les banques pourraient compenser les pertes occasionnées par la réduction des taux fixes par d’autres produits financiers. Les crédits à taux variable et à court terme, par exemple, offriraient aux banques des possibilités de maintenir leur rentabilité, malgré les pertes potentielles sur les crédits à taux fixe.
La mesure déjà en application
Le 23 janvier 2025, la Banque centrale a confirmé que la mesure de réduction des taux d’intérêt est désormais en vigueur, conformément à l’article 412 ter de la loi n°41 du 2 août 2024. Ce texte législatif, qui modifie certaines dispositions du Code de commerce, rend cette réduction obligatoire pour les banques, sans qu’une note d’application supplémentaire soit nécessaire.
Ainsi, bien que la mesure vise à alléger la charge des emprunteurs, elle pourrait entraîner des défis inattendus pour les banques. Les experts s’interrogent sur les conséquences à long terme de cette politique, notamment sur la viabilité du secteur bancaire tunisien.