Le décor est à présent planté : la Tunisie représentée par le Quartet vient de remporter le Prix Nobel de la Paix 2015 pour « sa contribution décisive dans la construction d’une démocratie pluraliste en Tunisie après la “Révolution du Jasmin” de 2011 », lit-on dans un communiqué rendu public par le comité Nobel norvégien.
Aussitôt la bonne nouvelle annoncée que le monde se tourne vers la Tunisie étant donné que l’exploit accompli est de taille puisque la Tunisie est parmi les rares pays arabes à avoir obtenu ce prix (Egypte et Yémen).
Le web tunisien égrène la fierté des Tunisiens, de leurs exploits et certainement l’exploit en question occupera encore les pensées des Tunisiens pour des mois. Revenons à la réalité des choses surtout que la remise des prix est prévue pour le 10 décembre à Oslo. D’ici cette date, un retour à la réalité tunisienne s’impose sur les dossiers urgents à l’instar des négociations sociales dans le secteur privé. Les négociations sociales demeurent une problématique qui alimente le débat entre les deux organisations nationales, à savoir l’UGTT et l’UTICA qui sont entre autres deux membres du Quartet. Quel impact aura l’obtention du prix Nobel sur les négociations sociales en Tunisie ?
Récemment les leaders des deux organisations nationales se sont livrés à une série de déclarations incendiaires ayant pour objet les négociations sociales relatives au secteur privé. D’un côté Belgacem Ayari, secrétaire général adjoint de l’UGTT, chargé du secteur privé a menacé de recourir à une grève générale sans précédent dans le secteur privé, de l’autre , l’UTICA n’a pas manqué de publier un communiqué annonçant sa disposition à défendre les intérêts de ses membres et son refus de toutes sortes de menaces.
La situation demeure sans issue, contrairement à la situation des fonctionnaires du secteur public qui ont réussi leurs négociations sociales sur trois ans. Ainsi un décalage se constate entre le secteur privé dont les salariés voient leur pouvoir d’achat se dégrader et les fonctionnaires de l’Etat dont les augmentations sont devenues conformes aux normes pour les prochaines trois années.
L’obtention du prix Nobel devrait inciter les deux organisations nationales à aller côte-à-côte pour réussir les négociations sociales du secteur privé car si elles ont pu épargner au pays l’anarchie du scénario égyptien, si le Quartet a su mener la barque à bon port dans un contexte tendu et marqué par les assassinats politiques que le pays n’a pas connu depuis 1961, réussir les négociations sociales n’est pas une tâche inaccessible surtout si l’UTICA et l’UGTT vont recourir à la même formule magique qui était à l’origine de la réussite du dialogue national : le consensus, le dialogue et la concertation. Ces trois mots sont les clés de la réussite du pays dans une dure épreuve et ils le seront toujours. Cet esprit devrait être enraciné au sein de la société civile.
D’autre part, la réussite des négociations sociales du secteur privé est un nouveau signal fort pour les citoyens tunisiens surtout qu’après l’obtention d’un tel prix, la responsabilité est devenue lourde sur les épaules de l’UGTT et l’UTICA pour préserver la paix sociale. Espérons que la centrale patronale et la centrale syndicale pourront assumer ce nouveau défi qui se présente à elles : éviter la tension sociale au secteur privé…